Appetite for Destruction - Martyre

Une sérénité morbide régnait sur le glacier de la Couronne de Glace, seul le vent glacial apportait la complainte de cette région désolée et parsemée d'os et de cadavres souvent inertes, parfois animés. Mais au loin dans les hauteurs retentissait des bruits sourds, comme un violent orage dont les débris enflammés et les corps mutilés se substituaient à la foudre et la pluie.

Le Brise-Ciel et le Marteau d'Orgrim perdaient lentement leur altitude, leur mécanique terriblement endommagée ne leur permettant plus de se mouvoir que par leur inertie et à ralentir leur chute. Le pont incendié de ces majestueux vaisseaux était la scène d'une bataille moribonde opposant les quelques dizaines de soldats encore en vie. Dans la coque du navire hordeux, lui aussi devenu fournaise, les gobelins avaient désertés leur poste. Seuls deux silhouettes se tenaient face à face au milieu des flammes.




_Ma tendre épouse..., prononça le premier.

Son teint était exsangue et ses cheveux d'un azur pâle. C'était un Réprouvé Chevalier de la Lame d'Ebene. Sa voix d'outre-tombe, torturée et sèche, contenait une once d'émotion induite par la femme aux yeux verdâtres et à la chevelure d'argent qui se tenait devant lui.

_Mirygg...

_Je ne suis pas celui que tu as aimé, tout comme lui. Mais tes souvenirs me hantent, m'obsèdent. Trop de souffrance a été semé et ce soir cela doit se terminer.

Les yeux de l'humaine s'écarquillèrent soudain, elle serra sa tête de ses deux mains comme victime d'une migraine fulgurante. Ses iris semblaient bruler d'une flamme glauque qui amplifiait à mesure que son cri étouffé s'estompait. Lorsqu'elle se redressa, son regard perdu devant le Mort Vivant devint glacial et antipathique.

_Ainsi donc Archérus s'est emparé de mon corps pour n'en faire qu'une piètre coquille sans âme, annonça-t-elle froidement d'une voix proche de celle du Chevalier de la Mort à laquelle résonnait la sienne.

_Regarde toi, tu as sacrifié ta propre raison pour maitriser une puissance qui te dépassait. Ton esprit est perverti par le chaos que tu cherches à contrôler...

_Je domine pleinement ma force ! La consumation de l'enveloppe charnelle était le prix à payer, prix que j'ai annihilé en devenant une partie latente de Sulfia.

_Et en prenant le dessus sur son esprit, c'est son propre corps qui en subit les effets. Elle hurle sans que qui que ce soit ne l'entende. Tu te sers d'elle, comme si elle n'était rien d'autre que ta marionnette. Vois ce que tu as fait de ta femme Mirygg ! Une esclave de l'amour qu'elle a éprouvé pour toi, un pauvre hère sans autre but que d'apaiser ses maux.

_Tout tes souvenirs sont miens, mais ton libre arbitre est pathétique ! Tu n'es qu'une pâle réplique de mon être, un imposteur ayant troqué son appétit de destruction par une soif de sang. Sulfia a accepté son sort, elle a accepté de me sauver la vie et de subir les tourments intrinsèques au Pacte.

_Elle n'est pas moins qu'une pauvre martyre.

Sulfia tendit son bras droit en direction de Mirygg

_N'INSULTE JAMAIS MA FEMME, s'écria-t-elle soudain tandis que ses yeux brillaient intégralement d'un vert étincelant.

Une flamme jaillit de sa main, frappant avec violence Mirygg qui eu tout juste le temps de se protéger de sa lame qui s'était brusquement couverte de givre. D'un coup d'épée, il la dissipa et constata que le brasier au milieu duquel ils se trouvaient tourbillonnait avec véhémence autour d'eux. Se mettant en garde, il planta ses dents gâtées dans son bras gauche d'où il aspira le sang coagulé.

_Il est temps.